Ils vont sans doute faire l’amour bientôt. Ils ne se connaissent pas mais ils se plaisent dans leur perdition agressive. Lui est malheureux : il se sent vieillir-plus de cheveux déjà- il s’ennuie avec sa femme, il ne dort plus depuis des mois, il ne sait pas comment sortir de l’impasse, rongé par la culpabilité, la colère contre l’autre et lui-même ; elle est mal remise d’une liaison dévastatrice qui lui vaut de replonger durement dans l’alcool. Ils boivent ensemble dans une gaieté violente. Il dit en levant son verre : « A nous ! ». Elle répond d’instinct : « Quelle ambition ! ». Il se pétrifie. Pense-t-il vraiment qu’elle va être sa solution, qu’un avenir commun leur est possible ? Elle boit pour chasser sa déconvenue à lui, presque touchante, pour ne plus penser à sa propre douleur et qu’il faudra bientôt replonger dans l’eau glacée de la vie lisse, à jeun, à côté des autres.
Boire et faire l’amour pour tuer le temps et la pensée.